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 cuisine, ma mere s'y precipitait a son tour et, vite, avant que Rose fut partie
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 au marche, revisait le menu et decommandait les trois quarts.
 "Eh bien. Rose! ces gelinottes2? criait grand-mere, au dejeuner.
  - Mais, ma mere, nous avions ce matin les cotelettes. J'ai dit a Rose de
 garder les gelinottes pour demain." La pauvre vieille etait au desespoir.
  "Les cotelettes! Les cotelettes! repetait-elle, affectant de rire. - Des
 cotelettes d'agneau; il en faut six pour une bouchee..."
  Puis, par maniere de protestation, elle se levait, enfin allait querir dans
 une petite resserre au fond de la salle a manger, pour parer a la desolante
 insuffisance du menu, quelque mysterieux pot de conserves, prepare pour
 notre venue. C'etaient le plus souvent des boulettes de porc, truffees,
 confites dans de la graisse, succulentes, qu'on appelait des "fricandeaux".
 Ma mere naturellement refusait.
 "Te4! le petit en mangera bien, lui!
 - Mere, je vous assure qu'il a assez mange comme cela.
 - Pourtant! vous n'allez pas le laisser mourir de faim?.."
  (Pour elle, tout enfant qui n'eclatait pas, se mourait. Quand on lui
 demandait, plus tard, comment elle avait trouve ses petits-fils, mes cousins,
 elle repondait invariablement, avec une moue:
 "Bien maigres!")
  Une bonne facon d'echapper a la censure de ma mere, c'etait de
 commander a l'hotel Bechard quelque tendre aloyau5 aux olives, ou, chez
 Fabregas le patissier, un vol-au-vent6 plein de quenelles7, une floconneuse
 brandade8 ou le traditionnel croutillon au lard. Ma mere guerroyait aussi,
 au nom des principes d'hygiene, contre les gouts de ma grand-mere; en
 particulier, lorsque celle-ci, coupant le vol-au-vent, se reservait un morceau
 du fond.
 "Mais, ma mere, vous prenez justement le plus gras.
  - Eh! faisait ma grand-mere, qui se moquait bien de l'hygiene - la
 croute du fond...
 - Permettez que je vous serve moi-meme."
  Et d'un ?il resigne la pauvre vieille voyait ecarter de son assiette le
 morceau qu'elle preferait*.
  ANDRE GIDE. Si le grain ne meurt (1926).
 Примечания:
  1. Имя служанки. 2. Рябчики. 3. Кладовая для продуктов. 4. Exclamation familier6
 aux Meridionaux. 5. Говяжье филе, вырезка. 6. Волован, слоеный пирог е наминкой.
 7. Мясные или рыбные фрикадельки, вообще мясной или рыбный фарш. 8. Треска
 по-провансальски: рубленая треска с маслом, чесноком и сливками.
 134
 
 Вопросы:
 * Faites ressortir la bonhomie et le naturel du dialogue.
 BALLADE DE FLORENTIN PRUNIER
 S'il y a *pa. r fois, en France, des meres abusives, comme celle que depeint
 Mauriac dans Genitrix, la mere est generalement la piece maitresse de la
 famille francaise: surtout a notre epoque ou, obligee le plus souvent de
 travailler a l'exterieur durant la journee, elle doit encore, en rentrant le soir
 chez elle, s'acquitter de l'ecrasante charge des soins menagers.
 GEORGES DUHAMEL, qui eut sous les yeux l'exemple d'une mere admirable entre
 toutes, a mieux que personne compris et exalte le theme de la tendresse
 maternelle: temoin cette touchante elegie, composee pendant la guerre de
 1914-1918...
 Il a resiste vingt longs jours
 Et sa mere etait a cote de lui.
 Il a resiste. Florentin Prunier,
 Car sa mere ne veut pa.s qu'il meure.
 Des qu'elle a connu qu'il etait blesse,
 Elle est venue, du fond de la vieille province.
 Elle a traverse le pays tonnant
 Ou l'immense armee grouille dans la boue.
 Son visage est dur, sous la coiffe raide;
 Elle n'a peur de rien ni de personne.
 Elle emporte un panier, avec douze pommes,
 Et du beurre frais dans un petit pot.
 Toute la journee elle reste assise
 Pres de la couchette ou meurt Florentin.
 Elle arrive a l'heure ou l'on fait du feu
 Et reste jusqu'a l'heure ou Florentin delire.
 Elle sort un peu quand on dit: " Sortez! "
 Et qu'on va panser la pauvre poitrine.
 Elle resterait s'il fallait rester:
 Elle est femme a voir la plaie de son fils.
 Ne lui faut-il pas entendre les cris,
 Pendant qu'elle attend, les souliers dans l'eau?
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 Elle est pres du lit comme un chien de garde,
 On ne la voit plus ni manger ni boire.
 Florentin non plus ne sait plus manger:
 Le beurre a jauni dans son petit pot.
 Ses mains tourmentees comme des racines
 Etreignent la main maigre de son fils.
 Elle contemple avec obstination
 Le visage blanc ou la sueur ruisselle.
 Elle voit le cou tout tendu de cordes
 Ou l'air, en passant, fait un bruit mouille.
 Elle voit tout ca de son ?il ardent,
 Sec et dur, comme la cassure d'un silex.
 Elle regarde et ne se plaint jamais:
 C'est sa facon, comme ca, d'etre mere.
 Il dit: "Voila la toux qui prend mes forces."
 Elle repond: "Tu sais que je suis la!"
 II dit: "J'ai idee que je vas1 passer."
 Mais elle: "Non! je ne veux pas, mon garcon!"
 II a resiste pendant vingt longs jours,
 Et sa mere etait a cote de lui,
 Comme un vieux nageur qui va dans la mer
 En soutenant sur l'eau son faible enfant.
 Or, un matin, comme elle etait bien lasse
 De ses vingt nuits passees on ne sait ou,
 Elle a laisse aller un peu sa tete,
 Elle a dormi un tout petit moment;
 Et Florentin Prunier est mort bien vite
 Et sans bruit, pour ne pas la reveiller*.
 GEORGES DUHAMEL. Elegies (1920).
 Примечания:
 1. Forme paysanne pour: je vais.
 Вопросы:
  * Cherchez dans cette piece les expressions simples, les details naifs qui lui conferent
 son emouvant nt. - Quelle est ici la forme du vers?
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 A LA FONDERIE
 La France est l'un des pays qui comptent le plus de femmes travaillant a la
 terre, a l'usine, au bureau. Ce travail est souvent tres rude, parfois meme
 inhumain, comme l'a montre SIMONE WE1L, cette intellectuelle courageuse qui
 n'a pas craint de s'embaucher dans une usine de fonderie pour y faire
 l'experience personnelle de la condition ouvriere.
  Imagine-toi1 devant un grand four, qui crache au-dehors des flammes et
 des souffles embrases que je recois en plein visage. Le feu sort de cinq ou six
 trous qui sont dans le bas du four. Je me mets en plein devant pour enfourner
 une trentaine de grosses bobines de cuivre qu'une ouvriere italienne, au
 visage courageux et ouvert, fabrique a cote de moi; c'est pour les trams2 et les
 metros, ces bobines. Je dois faire bien attention qu aucune des bobines ne
 tombe dans un des trous, car elle y fondrait; et pour ca, il faut que je me
 mette en plein en face du four, et que jamais la douleur des souffles
 enflammes sur mon visage et du feu sur mes bras (j'en porte encore la
 marque) ne me fasse faire un faux mouvement. Je baisse le tablier du four;
 j'attends quelques minutes; je releve le tablier, et avec un crochet je releve les
 bobines passees au rouge, en les attirant a moi tres vite (sans quoi les
 dernieres retirees commenceraient a fondre), et en faisant bien attention
 encore qu'a aucun moment un faux mouvement n'en envoie une dans un des
 trous. Et puis ca recommence. En face de moi, un soudeur, assis, avec des
 lunettes bleues et un visage grave, travaille minutieusement; chaque fois que
 la douleur me contracte le visage, il m'envoie un sourire triste, plein de
 sympathie fraternelle, qui me fait un bien indicible. De l'autre cote, une
 equipe de chaudronniers travaille autour de grandes tables; travail accompli
 en equipe, fraternellement, avec soin et sans hate; travail tres qualifie, ou il
 faut savoir calculer, lire des dessins tres compliques, appliquer des notions de
 geometrie descriptive. Plus loin, un gars costaud3 frappe avec une masse sur
 des barres de fer en faisant un bruit a fendre le crane. Tout ca, dans un coin,
 tout au bout de l'atelier, ou on se sent chez soi, ou le chef d'equipe et le chef
 d'atelier ne viennent pour ainsi dire jamais. J'ai passe la 2 ou 3 heures, a 4
 reprises (je m'y faisais de 7 a. 8 fr l'heure - et ca compte, ca, tu sais!). La
 Premiere fois, au bout d'i heure 1/2, la chaleur, la fatigue, la douleur m'ont fait
 Perdre le controle de mes mouvements. Voyant ca, tout de .suite, un des
 chaudronniers (tous de chics types) s'est precipite pour le faire a ma place. J'y
 retournerais tout de suite, dans ce petit coin d'atelier, si je pouvais (ou du
 moins des que j'aurais retrouve des forces). Ces soirs-la, je sentais la joie de
 Ranger un pain qu'on a gagne*.
 SIMONE WEIL. La Condition ouvriere (publie en 1951)
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 Примечания:
  1. Данный текст представляет собой фрагмент письма подруге. 2. Abreviation
 populaire; tramways. 3. Familier: un garcon vigoureux.
 Вопросы:
  * Relever dans cette page les expressions familieres, les tournures populaires. -.
 La derniere phrase ne trahit-elle pas comme un sentiment de culpabilite? Ne pensez-vous
 pas que l'intellectuel merite son pain tout comme un autre travailleur?
 HOMMAGE A COLETTE (1873-1954)
 COLETTE n 'aura pas ete seulement un des plus grands ecrivains francais de son
 temps. Elle aura eu surtout le merite de rester profondement fidele a sa nature
 de femme, et, par la, de degager toutes les ressources, toute l'originalite du
 genie feminin. LEON-PAUL FARGUE, qui l'a bien connue, lui a rendu le plus juste
 et le plus sensible hommage.
  Je la vois et la verrai toujours, Colette de Montigny-en-Fresnois1, tantot
 a Paris, plantee en plein c?ur du Palais-Royal2 comme une rose dans une
 boutonniere, tantot a La Treille Muscate, sa maison de Saint-Tropez3
 toujours la meme, avec cette sensualite exacte et brusque, cet amour de la
 vie de tous les jours, une lucidite inflexible. Je l'entends et l'entendrai
 toujours resumer son existence a grands traits:
  "Je travaille et je peine. C'est un metier de forcat que de s'enfermer
 chaque jour pour ecrire, alors qu'il fait si beau, que l'on se sent invitee
 a tout instant. Tenez, venez voir ma vigne... J'ai fait douze cents bouteilles
 l'annee derniere!.. Et mon potager? Je beche moi-meme, mais avant huit
 heures du matin. Apres, c'est l'encrier. Mais regardez donc mes tomates,
 mes artichauts. Je mange tres peu, et jamais de viande en ete. Des fruits,
 des legumes, un poulet de temps en temps. La sagesse, quoi!"
  D'autres jours, elle parle de la correspondance de ses innombrables
 lectrices: "Elles se racontent avec confiance, interrogent, ecoutent. L'une
 me demande un chat; l'autre, appauvrie, se lamente de devoir demenager et
 quitter son chien. Regardez: une grande ecriture extraordinaire, qui se
 heurte aux bords du papier comme un oiseau affole, croise ses lignes, se
 brise, revient sur elle-meme. C'est celle d'une amie inconnue et desesperee
 qui me crie: "Madame, est-ce que vous "pensez qu'il reviendra?" Et mille
 conversations encore touchant les odeurs de la Provence ou de la rue
 Vivienne, le Petit Chaperon Rouge, les lezards vifs comme des envies, la
 neige vivante des Alpilles, le soleil sur les seuils de ces villages du midi
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 ranges comme des noces sur le passage de la lumiere, les chevres, l'ail, le
 velours, la confiture, la chaleur blanche ou rose des plats cuisines qui
 attendent sur la table, la couleur du vin, desyeux, des soirs*. Et ce qu'elle
 ecrivit elle-meme un jour sur le voyage revient a ma memoire periodique-
 ment, comme un refrain ou je la retrouve toute: "Il n'est de depart que vers
 le soleil. Il n'est de voyage qu'au-devant d'une lumiere accrue; c'est avoir
 obtenu de la vieillesse le seul repit qu'elle puisse donner, que de
 s'arreter- encore un instant, encore un instant! - sous un ciel ou le
 temps, suspendu et reveur au haut d'un azur immobile, nous oublie..."
  Et je flaire dans cette sensibilite celle de toutes les femmes francaises,
 mes compagnes. (...) Ses traits reconnaissables entre mille, son style aux
 tendresses obscures et spontanees, cet amour si juste et si mesure jusque
 dans ses emportements, le gout des images, des verbes, de l'interrogation
 bien placee dans la phrase, tout cela est feminin et francais et l'on
 comprend bien pourquoi, dans les bibliotheques provinciales, chez un
 docteur, un marchand de vins, un horticulteur, ce sont les livres de Colette
 qui revelent le plus de ferveur et d'attention. Meme des passages entiers
 sont graves dans la memoire de quelque maitresse de maison, eblouie par
 une facon de dire qui serait la sienne s'il n'y avait pas ces quelques metres
 a franchir, ce rien, cet invisible abime qui la separe du genie.
  Et le genie de Colette, que les Francaises sentent si voisin du leur, de la
 meme famille et de la meme essence, est precisement de repondre a toutes
 les questions de la vie interieure de la facon la plus stricte, comme une
 Pythie5 genereuse. Elle est infaillible. Ce qu'elle dit du devouement, des
 joies, des plantes aromatiques, des chenilles posees comme des
 brandebourgs6 sur les doirnans7 de la nature, d'un verre d'eau fraiche, des
 chiens errants, des meditations interminables et laineuses8 du chat, des
 cadeaux, de la pluie, de l'enclume aux oreilles pointues, du chagrin secret
 de celles qui se sont trompees de regard, oui, ce qu'elle dit de cette
 horlogerie dans laquelle nous sommes embarques avec nos sentiments,
 semble surgir d'un code. Quelques critiques ont cru soulever une montagne
 en ecrivant qu'on ne trouvait pas chez Colette, incomparable artiste, grand
 poete et grand peintre, de reponses, meme incertaines, aux durs, aux
 tragiques problemes de la condition humaine, qu'elle ne prenait jamais
 parti dans les querelles qui mettent aux prises nos contemporains**. Et
 c'est de cela que les Francaises la louent. Car il n'y a pas de problemes!
 Tous se sont deja presentes, et tous ont ete resolus. C'est le coefficient qui
 change, et Colette le sait bien, mieux que personne***.
 LEON-PAUL FARGUE. Portraits de Famille (1947).
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 Примечания:
  1. В действительности Колетта родилась в Сен-Савёр-ан-Пюизе (департамент Йон
 на). Невольная ошибка, происшедшая от того, что Клодина, самая известная героиня
 Колетты, прообразом которй считалась сама писательница, родилась в Монтиньи
 2. Там Колетта жила в конце жизни, там же и умерла. 3. Город-курорт в Провансе. на
 берегу моря. 4. Мужчина, который бросил корреспондентку Колетты. 5. Пифия - в
 древней Греции жрица-прорицательница в храме Аполлона в Дельфах. Иносказатель-
 но - прорицательница. 6. Бранденбуры - галуны или петли из витых галунов на
 мундирах. 7. Гусарский мундир, расшитый галунами. 8. То есть спутанные и мягкие
 как непряденая шерсть.
 Вопросы:
 * Cette phrase ne fourrait-elle pas etre signee de Colette elle-meme? Montrez qu'elle
 evoque a merveille ce qu 'on pourrait appeler la sensualite de cet ecrivain.
 ** Que fiensez-vous, vous-meme, de ce grief?
  *** D'apres ce que vous pouvez connaitre de l'?uvre de Colette, trouvez-vous que ce
 portrait soit juste et complet?
 MES "TRENTE-HUIT HEURES"
 DE tous les sports, l'aviation est sans doute celui ou les Francaises se sont le
 plus souvent distinguees: Maryse Bastie, Helene Boucher, Jacqueline Auriol en
 ont fourni des preuves indiscutables. Plus recemment la •parachutiste Colette
 Duval battait le record du monde de hauteur en chute libre, parachute ouvert a
 250 metres du sol. Le recit, ou MARYSE BASTIE conte l'exploit qui lui valut de
 ramener "d'un seul coup a la France trois records de duree", fait ressortir
 avec force l'energie et l'endurance de l'indomptable aviatrice.
  La seconde nuil: fut effroyable. Je l'abordais1 au bout de trente heures:
 encore aujourd'hui, lorsque je l'evoque, j'ai des frissons retrospectifs et je
 crois que je recommencerais n'importe quoi, sauf ca!.. C'est indicible... il
 faut l'avoir vecu - et personne ne l'a vecu - pour comprendre.
  Le soleil s'est couche, le veinard2!.. Moi, je dois tourner encore et
 toujours... Je me fais l'effet d'une damnee dans un cercle infernal... Depuis
 des heures et des heures, attachee dans mon etroite carlingue3 mes pieds ne
 pouvant quitter le palonnier4, ma main droite ne pouvant lacher le manche
 a balai5 je subis cette effarante immobilite qui m'ankylose et me supplicie.
  Muscles, nerfs, cerveau, c?ur, tout chez moi me parait atteint: il n'y
 a que la volonte qui demeure intacte.
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 Des que je bougeais une jambe, je ressentais de si vives douleurs que je
 criais de detresse, seule dans la nuit. Ma main droite, blessee par le
 continuel frottement contre le manche a balai, saignait...
  Mon esprit n'etait pas moins douloureux que mon corps. Je vivais dans
 la perpetuelle terreur de rencontrer un des avions militaires qui, cette nuit-
 la, faisaient des exercices: je n'avais pas de feux a bord, et, dans l'obscurite,
 le feu arriere d'un avion se confond facilement avec les etoiles.
  A un moment, un avion passa si pres de moi que je cabrai6 mon
 appareil dans l'epouvante d'une collision que je crus inevitable. A peine
 remise de cette alerte, j'apercevais soudain un autre avion juste au-
 dessus de moi, si bien que je vis nettement les roues de son train
 d'atterrissage a quelques metres de ma tete. Ces circonstances etaient
 arrivees a me faire oublier le froid qui m'engourdissait - j'etais dans
 un avion torpedo7 - les intolerables crampes, la lassitude ecrasante.
 Mais je n'etais pas au bout de mes souffrances. Il semblait que le ciel
 eut mobilise toutes ses forces mauvaises pour les jeter en travers de ma
 route... Maintenant venait le sommeil, ce redoutable ennemi du pilote.
 C'etait le debut de la seconde nuit. L'incessant ronronnement du
 moteur, peu a peu, m'engourdissait le cerveau. Mes paupieres
 s'alourdissaient... Dans une sorte de semi-inconscience, j'evoquai la
 vision des gens qui rentraient chez eux, fermaient les volets sur
 l'intimite des chambres closes, allumaient leur lampe de chevet. Je
 pensais a mon lit, si douillet sous les chaudes couvertures, avec la
 tentation du matelas si uni, si elastique ou s'etendent les membres las...,
 la fraicheur du drap sous mes joues brulantes...
  Mes yeux se fermaient plusieurs fois par minute... Des mouvements
 inconscients faisaient cabrer ou piquer8 mon appareil et je me reveillais en
 sursaut, avec cette idee lancinante9: ah! dormir! dormir!..

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